La dame en blanc (Wilkie Collins)

Résumé :

Une nuit, Walter Hartright, jeune professeur de dessin, porte secours à une mystérieuse « dame en blanc » que semble poursuivre une obscure menace. La jeune femme, parmi des propos incohérents, laisse entendre qu'elle est familière d'un lieu où il doit prochainement se rendre - le manoir de Limmeridge, perdu dans les brumes du Nord - pour enseigner la peinture aux deux pupilles de Mr Fairlie, Marian Halcombe et Laura Fairlie.
Une fois sur place, à sa grande stupeur, Walter se rend compte que Laura ressemble étrangement à cette mystérieuse créature fantomatique, tout droit échappée d'un asile... Fervent défenseur de la cause féminine, il sent alors se nouer autour de lui un implacable complot : des mariages arrangés, voire meurtriers ; des hospitalisations de force par d'honorables familles soucieuses d'écarter des témoins gênants ; une société secrète qui fait poignarder les traîtres à sa cause...

 

Mon avis :

 

Le démarrage fut pour moi un peu poussif, entre le style assez formel (le roman fut écrit en 1860) et le rythme lent du premier chapitre visant à mettre en place les personnages et le contexte. Un professeur de dessin, William Hartright, sur le point d’être engagé dans une demeure anglaise pour enseigner son art à de jeunes femmes, fait une étrange rencontre nocturne sur une route menant à Londres : une femme, toute de blanc vêtue, apparaît comme surgie du néant et lui tient des propos confus dans lesquels elle le met en garde, mais sans préciser contre qui. A ce stade de l'histoire, on oscille entre romance, polar et fantastique sans pouvoir déterminer quel genre va l'emporter. 
Mais ce n’est pas pour rien si ce livre est considéré comme un des premiers « romans policiers » de l’histoire de la littérature : l'intrigue se met en place, avec un scénario relativement classique et des personnages que l’on cerne rapidement (à l’exception du comte Fosco, pour lequel j’ai conservé des doutes pendant un bon moment). Cependant, deviner ce qui va se passer s’est avéré moins évident que prévu ; certains rebondissements restent prévisibles mais d’autres nous surprennent au détour d’une page. Mystères et secrets de famille, révélations incomplètes, tentatives d’action avortées, manipulations savamment orchestrées et échappatoires inespérées font du roman une œuvre addictive.

 

Les personnages sont clairement à classer en deux catégories opposées. Les hommes sont principalement des êtres indifférents et égocentriques (Mr Fairlie), voire retors, froids, manipulateurs, usant de leur pouvoir social ou juridique pour se servir des femmes. Hartright fait exception et incarne parfaitement la « figure du chevalier blanc », désintéressé et pourvu d’un profond sens de l’honneur.
D’autres personnages secondaires masculins « positifs » viendront en appui dans un second temps (docteur, juriste, professeur…), mais, dans les premiers chapitres, on a clairement l’impression que les femmes n’ont aucune marge de manœuvre dans leur existence. Respect de la parole donnée, sens des convenances, les musellent.
Marian Halcombe, la sœur de Laura Fairlie, qui la pousse à tenir sa parole et écarte ceux qui pourraient la faire douter, m’a parue bien froide au début. Et pourtant, par la suite, elle se révèlera un personnage particulièrement fort, courageux, qui se surpasse grâce à l’amour profond qu’elle porte à sa sœur.

Le personnage de Laura, qui va être l’enjeu du roman, paraît bien fade en comparaison ! Du début à la fin, je l'ai perçue comme un jouet ballotté par les circonstances (ceci dit, rappelons le contexte : l’Angleterre du XIXè siècle limitait sérieusement les possibilités pour une femme de prendre son destin en main). Mais le tempérament même de l’héroïne est en cause : chez Laura, j’ai trouvé une résignation et une passivité parfois exaspérantes. Elle est belle, fragile et vulnérable, incarnant la princesse en détresse dont le salut ne pourra venir que d'un vaillant héros.

Un autre personnage féminin capital est celui d’Anne, mystérieuse, déséquilibrée, qui apparaît comme une sorte de Pythie connaissant de lourds secrets et pressentant les évènements tragiques à venir, sans toutefois pouvoir les expliquer de manière claire. Elle avertit, mais sans donner les précisions nécessaires à l’action, elle distille des informations au compte-goutte et, s'il devait y avoir un fantôme dans l'histoire, ce serait bien elle, de par l'omniprésence de son ombre qui plane sur le passé et le présent, sans toutefois apparaître très souvent physiquement.

 

L’usage de différents narrateurs selon les parties du roman permet de ressentir les points de vue des divers personnages et de révéler au lecteur ce qui reste secret pour les autres protagonistes. Une bonne méthode pour ménager le suspense. Le rythme varie entre passages où l’intrigue avance rapidement et des moments plus lents qui avivent notre impatience de connaître la suite.
 

L’ambiance est celle de l’Angleterre au XIXè siècle, dans un milieu aisé, au sein de belles demeures. Dans la deuxième partie du roman, Blackwater Park (le bien nommé !) est un domaine sombre, doté d'un étang sinistre... On verrait bien un meurtre s’y dérouler… Et justement, c'est en ce lieu que le danger rôde et que le piège se referme comme une toile d’araignée, avec l’argent pour motivation. Que peuvent faire l’héroïne et sa sœur pour y échapper ? Un meurtre aura-t-il lieu ?

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